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Le GPE, Grand Paris Express, un travail d’équipe

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Plus grand projet urbain d’Europe, le Grand Paris Express commence petit à petit à prendre forme. Comme à Aubervilliers où deux nouvelles stations ont été inaugurées fin mai, les Franciliens découvrent peu à peu leurs nouvelles gares et lignes de métro. Des changements majeurs dans leur vie quotidienne, dont l’irruption n’aurait pas été possible sans l’intense collaboration entre une multitude d’acteurs et d’intervenants.

Élus, ingénieurs, financiers, spécialistes des sous-sols, associations de riverains, experts environnementaux, transporteurs, administrations publiques… Le Grand Paris Express (GPE) a impliqué dès le départ une myriade d’acteurs différents, publics comme privés. Pour éviter la cacophonie, circonscrire et résoudre les inévitables polémiques, et plus globalement élaborer la vision la plus inclusive possible du projet final, il a fallu s’assurer que tous travaillent de concert pour concevoir et réaliser ce « chantier du siècle », qui s’apprête à révolutionner la mobilité et la vie quotidiennes de millions de Franciliens. 

Les élus locaux « en première ligne » du Grand Paris Express

Avec en son centre la Société du Grand Paris (SGP) comme maître d’ouvrage principal, le GPE a en effet un impact sur la mobilité de millions de personnes, ce qui explique la forte volonté de mener ce projet en entretenant une concertation permanente entre toutes les parties prenantes. Aux premiers rangs, on trouve les élus locaux, avec lesquels la Société du Grand Paris entend depuis le départ dialoguer de façon approfondie. « Les élus [locaux] sont en première ligne face aux interrogations des futurs usagers, des riverains, des commerçants », affirme Bernard Gauducheau, maire de Vanves et président du comité stratégique de la SGP. Mais la discussion se noue également en sens inverse, les élus eux-mêmes étant amenés à faire remonter les propositions et les doléances de leurs administrés à la Société du Grand Paris. 

Du côté des nuisances, qui peuvent avoir un impact aussi bien sur l’économie locale que sur la tranquillité des riverains, la Société du Grand Paris a dès 2016 mis en place un médiateur afin d’enregistrer les plaintes et de prévenir les conflits. Une initiative louable qui a le mérite de porter le dialogue avec les habitants dont la vie quotidienne est nécessairement affectée par des travaux qui durent plusieurs années. Et, si la Société du Grand Paris prend cette mission à cœur, les acteurs du BTP se sentent particulièrement concernés par le dialogue avec les édiles. 

Les entreprises du BTP nourrissent le dialogue

Difficile, voire impossible, pour un chantier aussi important que le GPE de ne pas engendrer de nuisances : allées et venues des camions, retombées de poussière, salissement des chaussées, pollution sonore… « Le Grand Paris est un chantier au cœur de la ville, dans un tissu urbain très dense », note Benoît Moncade, directeur général de Spie Batignolles Génie Civil. « Nous avons un défi d’acceptabilité́ primordial pour les riverains du fait des nuisances créées, des flux pour les déblais… C’est un point d’attention permanent ». D’autant que les entreprises du BTP sont souvent perçues comme les premières responsables de ces nuisances, et peuvent être montrées du doigt autant par les élus locaux que les riverains. Ce fut le cas, par exemple, à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine), où une association d’habitants excédés par les bruits du chantier de la gare Pont-de-Sèvres avait lancé une pétition en 2019, demandant notamment la fin des travaux de nuit.

Pour désamorcer les tensions, certaines entreprises du BTP préfèrent donc entrer en concertation directe avec les élus. C’est ce qui s’est passé à Saint-Maur-des-Fossés (Val-de-Marne), où la gare la plus profonde de France est en cours de construction. Le PDG d’Eiffage, Benoît de Ruffray, est personnellement entré en contact avec le maire Sylvain Berrios afin de trouver un terrain d’entente concernant les nuisances et l’impact des travaux sur les Saint-Mauriens.

La discussion a abouti à la signature d’une charte de développement durable et de responsabilité sociétale entre l’entreprise et la commune. « Ce protocole a précisé un certain nombre de mesures que nous avons prises pour atténuer les nuisances, inhérentes à ces chantiers. Cela a été l’occasion d’instaurer un dialogue constant, et d’excellentes relations avec l’équipe municipale », détaille Benoît Maureaudirecteur chez Eiffage Génie Civil. « [Le protocole] a permis d’asseoir une relation de confiance exemplaire avec le maire. »

En matière de nuisance, confiance et anticipation sont les clés du succès. Les premières mesures peuvent même être prises très en amont, bien avant le début des travaux. « Chacun de nos projets fait l’objet d’un PRE (plan de respect de l’environnement), élaboré dès la réponse à l’appel d’offres, qui anticipe les nuisances et décrit les procédures pour les atténuer, voire les supprimer », indique Patrick Fila, directeur QSE chez Demathieu Bard, entreprise du BTP en charge notamment du génie civil sur le lot 17-1 du GPE, qui reliera Le Bourget (Seine-Saint-Denis) au Triangle de Gonesse (Val-d’Oise). Une manière de montrer patte blanche aux municipalités avant même le premier coup de pioche.

La difficulté à gérer les nuisances, sur un chantier aussi imposant que le Grand Paris Express, est aussi exacerbée par l’importance du nombre d’intervenants sur un lot particulier : entreprises d’un même groupement, sous-traitants… Autant d’acteurs différents qui peuvent avoir des pratiques et des manières de travailler différentes. Mais cette collaboration s’impose d’elle-même, notamment à cause de la nature des travaux. 

Le BTP, quand collaboration rime avec optimisation

Génie civil, métal, infrastructures, systèmes, rail… C’est — entre autres — la palette de métiers qui est demandée aux acteurs du BTP pour être en mesure de réaliser les travaux des différents lots du GPE. Pas facile pour autant pour une seule entreprise, même plutôt diversifiée, de réunir toutes ces expertises en interne. C’est pourquoi les sociétés de construction postulent le plus souvent en s’associant avec leurs pairs, sous la forme de « groupements d’entreprises ».

Exemple parmi d’autres, sur le fameux « méga-lot » 1 de la ligne 16, un groupement mené par Eiffage Génie Civil a emporté la mise grâce à une association avec Razel-Bec (Fayat) et TSO (NGE). « Eiffage cherchait un groupement de spécialistes et, tout particulièrement, un poseur de voies ayant déjà fait ses preuves sur des projets similaires », raconte Gilles Philibert, directeur général de TSO. Les logiques de concurrence cèdent le pas au partenariat et à la complémentarité des expertises.

Ce qui n’empêche pas pour autant les entreprises bien diversifiées de mobiliser leurs sociétés sœurs. C’est ce qui s’est passé sur le lot n°3 de la ligne 16, qui a été remporté — fait assez remarquable — par des entreprises du groupe Fayat uniquement : Razel-Bec, Sefil-Intrafor et Fayat Métal.

Mais, sur des appels d’offres plus imposants, dont le montant peut dépasser le milliard d’euros, les groupements rassemblent le plus souvent une importante variété de sociétés venant de groupes différents. « Il faut s’associer à des gens qui savent faire et qui ont une culture compatible avec la nôtre », indique Antoine Metzger, président de NGE. L’enjeu, sur ce type d’appels d’offres, est effectivement surtout d’assurer au maître d’ouvrage une cohérence optimisée dans la conception comme dans la réalisation du chantier. Ce rôle revient naturellement au leader du groupement, qui a la charge d’assurer la coordination de l’ensemble des intervenants, et ce, dans tous les domaines : exécution des travaux, sécurité, inclusivité sociale, environnement, réduction des nuisances…

« Il faut que tous les acteurs, ses sous-traitants, ses co-traitants dans les groupements, aient le même niveau d’exigence », explique Guillaume Sauvé, PDG d’Eiffage Génie Civil. Et de préciser : « [Nous incluons] le facteur « nuisance pollution environnement » dans les critères de choix, outre les sujets éthiques et ceux de la performance métier. Il faut vraiment que le partenaire soit sur la même longueur d’onde que nous pour être sélectionné ». Une garantie indispensable pour garantir l’homogénéité des chantiers.

Cette logique sera d’ailleurs poussée encore plus loin sur les prochains contrats du Grand Paris Express, qui seront passés en « conception-réalisation ». La SGP confiera à la fois les études et les travaux à un seul attributaire par lot, renforçant davantage la mise en cohérence globale des chantiers. « Comme nous pilotons d’une part la conception, et d’autre part la réalisation, la conception-réalisation nous permet d’avoir une vision intégrée des deux phases, et donc d’en assurer logiquement l’optimisation », explique Pascal Hamet, directeur du projet du lot 1 de la ligne 16 chez Eiffage Infrastructures. Les groupes du BTP les plus aptes à assurer la cohésion et à optimiser une offre commune seront ainsi en mesure de proposer des alternatives au maître d’ouvrage, notamment en matière d’innovation et de réduction des coûts.

Cette intégration « totale » permettra in fine à la SGP de se concentrer sur ses autres missions : dialogue avec les élus locaux, les collectivités publiques et l’État, mise en cohérence globale du projet, optimisation des relations avec les parties prenantes… La conception-réalisation poussera donc encore plus loin les logiques de collaboration et de dialogue que l’on a vues naître sur ce chantier unique qu’est le Grand Paris Express.

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